lesechosLa France vient donc de transmettre sa liste de travaux éligibles au plan Juncker, soit 32 projets couvrant un large spectre de secteurs pour 48 milliards d’investissement estimés. Notre pays s’engage ainsi dans une ambition européenne nouvelle, car l’initiative du président de la Commission s’inscrit dans le cadre plus large des priorités de son mandat. Celles-ci favoriseront tout à la fois un achèvement du marché intérieur, l’émergence de nouvelles sources de financement de long terme et des leviers de modernisation de l’action publique. Mais il y a aussi tout lieu de penser que Paris bénéficiera à brève échéance de cette relance de l’investissement.

La France a en effet présenté des grandes priorités transversales plutôt qu’une liste éparse de projets d’infrastructures, dont certains auraient pu être insolvables. Le numérique, l’innovation, la modernisation des entreprises, les transports, la transition énergétique et l’éducation sont autant de secteurs d’avenir se situant dans la ligne des politiques européennes. Le flux de projets qu’ils génèrent, d’une taille généralement modeste et autorisant des prises de décision rapides, seront à même d’accélérer la réalisation à grande échelle de nos besoins, de créer des emplois et de susciter la confiance des investisseurs internationaux.

La rénovation thermique des bâtiments pourrait être un bel exemple du processus vertueux que le plan Juncker est de nature à enclencher. En s’appuyant sur un cadre législatif rénové par la loi de transition énergétique portée par Mme Ségolène Royal, une série d’investissements seront réalisés par des opérateurs spécialisés suivant des processus industriels standardisés. Ainsi, de nouvelles classes d’actifs seront identifiables sur les marchés. La décision publique du financement de l’économie sera donc modernisée en même temps que le savoir-faire, les technologies et le capital du secteur privé seront valorisés.

Le plan Juncker peut également aider la France à mieux sceller la confiance de ses partenaires. En agissant tant sur la demande à court terme que sur le renforcement, à moyen terme, d’un potentiel de croissance durable, la relance de l’investissement soutiendra l’activité française et accompagnera le mouvement de réformes de notre pays. Elle peut donc bien agir comme un complément des mesures de rigueur qui doivent être maintenues afin de démontrer leurs effets à la Commission européenne et au plus vigilant de nos partenaires. Ne sous-estimons pas l’amélioration du cadre de politique économique que le plan Juncker induit.

La France gagnerait sans doute à abonder, par le biais de la Caisse des Dépôts ou de BPI France, le nouveau Fonds européen pour les investissements stratégiques. Cette contribution aurait le double avantage de ne pas être comptabilisée dans la dette maastrichtienne et de donner à l’Etat une voix dans la sélection de l’ensemble des projets. La France afficherait alors son ambition de participer pleinement à une initiative dont la réalisation pourrait surprendre, puisque la Commission a indiqué qu’il n’était pas exclu que 500 milliards d’investissement soient conformes aux critères d’éligibilité.

Des priorités sectorielles clairement identifiées, un volume d’investissement substantiel et une mobilisation du capital facilitée par la garantie de la Banque européenne d’investissement sont autant d’atouts que l’Europe met rapidement en oeuvre pour assurer la réussite d’un projet allant bien au-delà d’un simple effet de levier.