lesechosLes élections européennes auront été l’occasion d’exercer son suffrage en conscience de ce que l’Union a pu nous apporter ces dernières années et de son potentiel.

L’Europe a été initialement touchée par la crise financière fomentée aux Etats-Unis en raison de la mauvaise régulation mondiale de ses institutions financières et du surendettement de plusieurs de ses États. Elle y a tout de même bien réagi en favorisant la coordination des politiques budgétaires et en menant une politique monétaire qui s’est progressivement modernisée. Elle a développé des mécanismes de sauvetage solidaires, renforcé son architecture de supervision financière et mis en oeuvre, sous l’impulsion de Michel Barnier, un agenda de régulation sans précédent. L’Union bancaire représente, compte tenu des intérêts en présence, l’une des avancées les plus abouties et les plus rapides de ces dernières années. La Banque européenne d’investissement, recapitalisée, est à même de catalyser sur la période 2013-2015 plus de 180 Milliards d’Euros. Elle favorise, conjointement avec la Commission, la transition d’une culture de la subvention à une culture du financement de long terme de l’économie européenne.

La réaction de l’Union à la crise a ainsi été substantielle. Et les défis auxquels les États et les institutions s’attellent désormais sont aussi porteurs de perspectives positives ! C’est en engageant des réformes de structure et en assainissant durablement ses finances publiques  que la France retrouvera une proximité pérenne avec l’Allemagne et une plus forte crédibilité européenne. Une coordination effective des politiques économiques dans le cadre du Semestre européen implique des efforts conséquents, mais permet d’améliorer l’union monétaire. Une réflexion sur le financement du budget communautaire est heureusement engagée par Mario Monti. Les États se sont également accordés sur une grande politique en faveur de l’innovation, Horizon 2020, qui est à même, par ses déclinaisons sectorielles (industrie, recherche, aménagement urbain, énergie), de renforcer le potentiel de croissance européen. La fin du secret bancaire ouvre la voie à une coopération fiscale accrue des États de nature à concilier rigueur et équité.

Les élections sont aussi une chance de mieux tirer parti des avancées institutionnelles de l’Union et de bénéficier de l’expérience des candidats aux grandes fonctions. Le Traité de Lisbonne invite les États membres à nommer le Président de la Commission en fonction des résultats du scrutin. Il serait préjudiciable de ne pas en tenir compte alors que le Parlement européen a vu ses droits constamment renforcés au fil des derniers Traités. La constance avec laquelle l’Allemagne y a œuvré contraste d’ailleurs avec le manque d’influence qu’y exercent les parlementaires français. Le Président du Conseil peut être davantage qu’un conciliateur des intérêts des grands États, qui ont trop pris le pouvoir à la faveur de la crise, mais bien incarner une véritable conscience du projet politique de l’Europe et être un pont entre les « grands » et les « petits ». Une Commission renforcée par l’onction du suffrage universel pourra mieux assurer sa responsabilité d’initiative législative et confirmer une capacité d’arbitrage plus souple.

Les élections européennes ont constitué un nouveau moment de confusion entre les lacunes des gouvernements et celles de l’Union. Elles nous invitent au contraire à réfléchir à la singularité d’un projet historique envié (en Ukraine mais dans tant d’autres pays aussi !) et à la façon dont il est porteur de progrès pour nos peuples, comme pour le reste du monde. Car l’Europe est bien, ainsi que le rappelle Pascal Lamy(1), à même de « civiliser la mondialisation ».

(1) Pascal Lamy, Quand la France s’éveillera, Odile Jacob, 2014