La Commission européenne a présenté en décembre dernier ses dernières pistes de réforme de l’architecture économique de l’Union et de la zone euro.

Malgré le peu de soutien politique dont aura bénéficié cette initiative lors du  sommet dédié du 15 décembre , on peut sans doute considérer avec intérêt les propositions faites, qui laissent espérer une esquisse de compromis entre les Etats membres en temps voulu.

Un précédent important

La Commission européenne tend d’abord à conforter la réappropriation collective des enjeux d’approfondissement de l’Union économique et monétaire.

Au cours de ces dernières années, en effet, les Etats, les acteurs financiers et les opinions ont su préserver l’intégrité de la zone et apprécier les avantages de sa monnaie.

Puis, de nouvelles pratiques promouvant une gestion macroéconomique plus efficace et légitime ont été observées : le semestre européen facilite ainsi depuis 2011 une coordination étroite des politiques économiques et budgétaires ; une politique budgétaire commune plus contracyclique a été promue ; les Etats ont mis en oeuvre certaines réformes, notamment afin de réduire leurs dépenses publiques. Ce socle est un précédent important.

Des avancées consensuelles

L’exécutif communautaire propose aujourd’hui des avancées consensuelles.

Le Mécanisme européen de stabilité (MES) aurait, par exemple, vocation à fournir une ligne de crédit au Fonds de résolution unique (FRU), sécurisant ainsi le deuxième pilier de l’Union bancaire, mais ne serait, heureusement, pas doté de pouvoirs budgétaires, comme le souhaiteraient des conservateurs allemands.

Plutôt qu’un budget de la zone euro, idée chère à Paris, une « capacité budgétaire » plus modeste servirait tout de même un double objectif de convergence et de stabilisation.

Enfin, l’exercice de la présidence de l’Eurogroupe entre les mains du commissaire économique constituerait, malgré tout, un symbole et un précédent importants à même de renforcer la gestion macroéconomique de la Commission.

Pour la démocratie

Les pistes proposées sont aussi porteuses d’avancées démocratiques fortes. La transformation du MES en Fonds monétaire européen, et l’octroi du statut d’institution européenne, éloignerait non seulement le spectre de l’implication, humiliante, du FMI en Europe, mais le soumettrait surtout à un contrôle renforcé du Parlement européen.

De la même façon, le « ministre des Finances » proposé, même s’il n’avait que de « simples » fonctions de coordination des instruments existants, serait en mesure de mieux rendre compte de ce que fait l’Eurogroupe. Qui peut s’y opposer ?

Enfin, la réintégration, d’ailleurs prévue par les Etats signataires, du pacte budgétaire dans le droit européen permettrait sa révision ultérieure avec plus de souplesse et de légitimité. La « communautarisation » recherchée des outils permet bien plus de démocratie.

L’intérêt d’élargir la zone euro

En quatrième lieu, les positions de Bruxelles renforcent l’Union européenne aussi bien que la zone euro et organisent leur plus grande similitude dans le contexte du départ des Britanniques, tous les mécanismes proposés étant ouverts aux pays non euro.

La zone euro bénéficiera par exemple d’un outil d’aide aux réformes structurelles nationales et de mesures de soutien aux investissements des Etats dans les périodes de crise.

L’Union européenne, pour sa part gagnerait un crédit politique, et peut-être un dynamisme économique, à voir la zone euro s’élargir, puisque celle-ci représente le « cercle » le plus avancé de l’Union composé de plus de privilèges mais aussi d’obligations.

Le paquet de la Commission n’est donc pas un terne compromis entre les ambitions françaises et les vues d’Etats plus rigoristes, qui l’auraient discrédité. Il prépare un débat, que l’on peut encore espérer fructueux, des capitales au cours de la courte période qui s’ouvre avant les élections européennes. La convergence de vues franco-allemande demeure, à cet égard, essentielle.

Olivier Marty enseigne les institutions et l’économie européennes à Sciences Po et à HEC.

 

Article publié dans Les Echos le 03/01/2018